Sujet de coordination de la mission, ici.

Participants autorisés : Seth Sullivan, Aleksei Lieven, Max Willsdorff, Ann Vanderwaart, Julian Daugherty, Jóhanna Paulsen, Indira Ambari, Saona Kalani.

Les horloges de la Tortue et leur planning artificiel avaient annoncé le début de la soirée il y a plus d'une heure maintenant. Comme souvent sur Pandora, où les deux soleils jouaient à cache-cache dans le ciel, la nuit n'en était pas vraiment une. Seule une atmosphère crépusculaire donnait à la base terrienne un semblant de sérénité vespérale. Mais les humains, d'humeur festive en cette soirée particulière, avait accroché de petits lampions de toutes les couleurs, de ci de là, à l'intérieur comme à l'extérieur. Cela donnait à cette base à l'architecture militaire une apparence aussi saugrenue que festivalière. A l'intérieur, les préparateurs de la soirée ne s'étaient d'ailleurs pas gênés pour rajouter des décorations inhabituelles. Dans la salle commune, guirlandes en papier et autres breloques de fortune pendaient du plafond ou serpentaient le long des murs. Une chaîne hi-fi diffusait les nouveaux tubes - ceux qui venaient de leur parvenir de la Terre, pour les mettre aux "goûts du jour".

Ils avaient tant à se dire, tant de choses à fêter ou à oublier. C'était la plus grande soirée organisée depuis leur arrivée sur Pandora. Raven Galloway lui-même avait proposé l'idée, désireux de détendre l'atmosphère et lacérer toute nostalgie suite aux rappels de ce qu'ils avaient laissé derrière eux. Une grande partie du personnel était présente. Peu avait fait le choix de rester seuls avec leurs peines et leurs doutes. La plupart des absents étaient de garde. Ils seraient relevés dans une heure pour qu'ils puissent participer à leur tour à la soirée et se détendre. En somme, l'esprit n'était pas au travail et aux soucis. On avait même ouvert bouteilles de vin et d'alcools divers et variés, mets exotiques et précieux embarqués et gardés pour une occasion spéciale... les membres de l'expédition se permettaient quelques folies, les premières depuis leur départ de la Terre pour la plupart. Mais des mets locaux, pandoriens, avaient également été préparés, comme s'ils avaient besoin de se rappeler où ils étaient.

Mais pour cela, il leur suffisait de vouloir faire un tour dehors pour échapper à la foule, au bruit et à la chaleur. Sur Terre, ils auraient pu laisser une porte-fenêtre ouverte et sortir comme si de rien n'était. Sur Pandora, il leur fallait gagner le sas le plus proche, enfiler un masque, et enclencher le système du sas pour pouvoir sortir sur les ponts extérieurs, où ils pouvaient admirer les lueurs se reflétant sur le lac... sauf que le baiser au clair de lune... eh bien il était exclu.

Les personnes ayant choisies de rester à l'intérieur avaient à leur disposition boissons, nourriture, musique, danse et jeux à volonté. La salle commune et le réfectoire dont les portes avaient été largement ouvertes pour l'occasion bruissaient du bruit des conversations et des rires, couvrant le morceau de musique provenant des enceintes. Seth Sullivan traversa la foule, un verre dans chaque main, à la recherche de Mireia : c'était elle qui l'avait trainé à cette soirée, et il l'avait laissé près de la piste de danse le temps d'aller chercher à boire pour eux deux. Le problème c'est qu'au milieu de cette foule il n'arrivait plus à la retrouver et qu'il devait se battre pour ne pas renverser leurs boissons. Il s'arrêta près d'une table où s'étaient installés quelques joueurs de poker, entourés par une foule d'observateurs encourageant leurs favoris. Max Willsdorff, Ann Vanderwaart, Aleksei Lieven et Julian Daugherty s'y trouvaient. Max et Ann discutaient à bâtons rompus, leurs verres à portée de main. Tandis que les deux médecins se concentraient sur le jeu.

Un peu plus loin, Indira Ambari se frayait un chemin dans la foule. Elle était venue pour essayer d'oublier les nouvelles qu'elle avait reçu de la Terre, mais elle avait du mal à se mettre dans l'ambiance et à prendre plaisir dans cette fête. Étouffant au milieu de tout ce monde, elle se glissa dans un coin, observant la fête sans y participer. Soudainement, un verre apparut dans son champ de vision. Jóhanna Paulsen lui sourit joyeusement, son propre verre en main. Elle engagea la conversation et tenta de l'encourager pour participer aux réjouissances.

C'est à cet instant que lumières et son s'éteignirent. Les salles furent plongées dans la pénombre : seule la lumière crépusculaire venant de l'extérieur, par les baies vitrées, éclairait la pièce. La disparition de la musique aurait pu à la limite paraitre inaperçue, si l'extinction des lumières n'avait pas coupé tout un chacun dans sa conversation. Un silence surpris pesa un instant sur la foule, avant que des murmures inquiets ne s'élèvent peu à peu. Des personnes effrayées se bousculèrent, provoquant un mouvement de foule.

Ce qui devait arriver arriva : Seth renversa ses gobelets sur Aleksei. Les joueurs de poker furent pressés contre la table, et Miriam et Indira serrées dans leur coin. La confusion était à son comble.

Seth avait la désagréable impression de s’être fait piégé. Malgré tous ses efforts, il n’avait pas su décliner l’offre de Mireia et était maintenant contraint de participer à cette soirée de réjouissances. Il doutait qu’un tel mot soit convenable dans les circonstances puisqu’il ne trouvait rien divertissent à cette soirée. Il se devait d’évoluer dans une foule compacte où se mêlait l’odeur oppressante des parfums aux relents nauséabonds de la sueur. En résultait une atmosphère fétide et difficilement respirable que, selon l’avis de certains, semblaient propice à la fête et au plaisir. Un autre bel exemple de la folie humaine : un ordinateur, doté, contrairement à l’homme, d’un semblant de logique, ne se serait jamais fait prendre dans cette situation.

Mais, voilà, la belle avait de beaux yeux et, pour cette raison, il se devait de jouer à « l’Homme Charmant, mais-qui-a-une-idée-derrière-la-tête ». Il avait même poussé la galanterie à son extrême alors qu’il avait gentiment proposé d’aller leur chercher de quoi se désaltérer. Il tentait donc de se frayer, tant bien que mal, un chemin vers le bar alors que Mireia l’attendait. Il dû jouer des coudes et forcer le passage à quelques reprises, arrachant quelques reproches aux danseurs qu’il avait bousculé. Il ne prit pas la peine d’arrêter s’excuser. Si ces collègues étaient réellement froissés par son manque de manières, ils n’auraient qu’à ajouter une plainte officielle à la base de donnée de Mnémosyne et il prendrait lui peine de l’effacer, par moyens détournés, bien entendu.

Une demi-douzaine de coup de coudes plus tard, il atteint finalement son objectif : le bar. Sa satisfaction fut de courte durée alors que le serveur lui demanda se qu’il désirait. Lui qui, d’ordinaire, ne carburait qu’au café et binaire se perdait un peu devant l’immense variété de cocktails, boissons et autre… truc. Que lui présentait, d’un geste quasi théâtral, le barmain. Son regard parcouru les liquides et les bouteilles à la recherche d’une couleur ou d’une marque inspirante. Contrairement à plusieurs ici, il n’avait jamais ce genre d’expérimentation durant ces années de collège. En signe d’ignorance, il haussa les épaules avant de prononcer :

« Euh… c’est que je ne m’y connait pas trop. Donnez-moi votre cocktail préféré »

Le serveur lui lança un sourire mi-compatissant mi-moqueur avant de s’exécuter. Seth contempla la précision de ces gestes. L’assurance des mouvements lui rappelait la sienne lorsqu’il travail à réparer une ordinateur, s’en était presque robotique, calculé. Une fois les verres en main, il s’accorda une dernière respiration d’air « sain » avant de rebrousser chemin et de retourner vers la foule déchainée.

Cette fois, le défi doubla en difficulté. Non seulement il devait retrouver Mireia, mais en plus, devait accorder une attention particulière aux verres qu’il tenait, pour éviter d’en déverser le contenu sur l’un de ses collègues. En fait, il se fichait du collègue s’était surtout pour éviter de ramener un verre à moitié vide à sa douce. Cette fois plus attentif à ce qui l’entourait, puisqu’autrement il ne pourrait pas retrouver sa copine dans la foule, Seth remarqua qu’Ann Vanderwaart, qu’il avait déjà rencontrée, s’adonnait à une partie de carte en compagnie d’autres individus qu’il ne connaissait que de nom ou de réputation. Spontanément, il se dirigea vers le groupe en espérant que Mireia était parmi les curieux qui observaient la partie.

« Poker » comprit-il en se rapprochant de la table en se rappelant que la seule activité qu’il avait fait dans le domaine avait été de pirater, il y a plusieurs années déjà, les sites pokeronline.com et gameaddict.org. Le premier pour des raisons évidentes, le second pour empêcher les habitués du premier site de guérir de leur addiction aux jeux de hasard.

Arrivé à bonne distance de la table, il continuant à s’avancer en se risquant en salutations :

« Bonjour, vous auriez pas vu… »

Les lumières s’éteignirent subitement, laissant les fêtards dans une ambiance tamisée. Le bourdonnement des machines, dont les systèmes de survies, cessa. Seul le murmure d’incompréhension de la foule entachait le calme qui régnait dans la pièce. La panne s’éternisa sur plusieurs secondes provoquant un relent de panique chez les habitants de la Tortue. L’hystérie générale ne se fit pas attendre plus longtemps.

Les employés de la base commençaient à se bousculer cherchant désespérément une issue, qui, dans les circonstances n’existait pas. Dans la cohue, Seth renversa son verre sur l’un des joueurs de carte, mais ne se soucia guerre de la réaction de ce dernier. L’urgence de la situation passait avant ce genre de péripéties.

« 21 secondes » compta-t-il.

À ce stade, le système électrique de la Tortue aurait dû basculer automatiquement sur l’énergie de réserve. L’ampleur du problème le frappa d’un coup : sans électricité, Mnémosyne ne pouvait fonctionner et effectuer des tâches aussi cruciales que la gestion des systèmes de survie. Sans-eux, la base n’était pas renouvelée en oxygène et ses occupants subirait bientôt les conséquences de ce manque : étourdissements, diminution significative des capacités motrices, et, ultimement, la mort. Avant d’en arriver là, il fallait procéder au redémarrage des systèmes de survie, dans les plus brefs délais.

Pour une fois, Max n'était pas de service et pouvait ainsi profiter des réjouissances organisées par le comité d'accueil de Pandora. Une petite fête était ainsi donnée pour fêter l'arrivée du corps expéditionnaire terrien. La Tortue s'était transformée en véritable sapin de Noël, des petits lampions parcouraient ainsi ses flancs sur toute sa longueur, transformant radicalement sa fonction principale. S'ils voulaient se faire discrets, c'était raté pour ce soir.

La bonne humeur était au rendez-vous pour les petites festivités. Sauf pour Max. Les seules nouvelles de la Terre qui lui étaient parvenue provenaient de sa mère, et elles n'annonçaient rien de bon. Le Sud-Africain avait alors appris la mort de son père, au cours d'un coup d'état en Namibie, suivie de celle de la plupart des membres de son ancienne unité de forces spéciales à la suite de la guerre qui en avait découlé. Le pays qu'il connaissait avait radicalement changé, et se retrouvait donc en état de guerre. Max avait accusé le coup, se posant perpétuellement des questions, tâchant de comprendre son implication dans la mission, tâchant de découvrir si après tout, il n'avait pas fait le mauvais choix et que sa place était là-bas, dans le bush, à traquer les ennemis de son pays.

Mais il essayait de donner le change, de paraître au mieux de sa forme et non pas affecté par les nouvelles qui lui étaient parvenues. Ses supérieurs hiérarchiques n'étaient pas au courant, et Max avait trouvé pour seule solution de se plonger dans le travail et d'enchaîner les "heures supplémentaires". C'était le seul moyen qu'il avait trouvé pour tâcher d'oublier les décès de son père et de ses anciens compagnons d’armes, des personnes qu’il avait côtoyé de longues années, avec qui il avait partagé tant de moments difficiles et qu’il considérait comme ses frères. Avec leurs décès, une partie de lui-même était également morte. Le courrier de sa mère stipulait qu’il restait tout de même un rescapé de son ancienne équipe, mais qu’il était désormais invalide. Peut-être que s’il avait été là-bas avec eux, les choses auraient été différentes.

C’était l’un des supérieurs de l’officier qui avait forcé le sud-africain à prendre sa soirée et à se rendre à la petite fête. Max avait enchaîné les gardes et les différentes revues de matériels ces derniers jours et ce peu de repos ne pouvait lui faire que du bien. Et puis il en profiterait pour tâcher de voir Jó ‘ et de passer un peu de temps avec. L’Islandaise saurait lui remonter le moral, rien que par sa présence. Bref, l’heure avançait et Max terminait de se préparer. Cela faisait quelques jours qu’il n’avait pas eu l’occasion de porter de vêtements « civils » et il fallait avouer que cela faisait du bien !

C’est donc en chemise et jean que le militaire fit son apparition dans la salle commune ou se tenait la petite réception. Il se sentait à l’aise, et affichait même un petit sourire –comme à son habitude- pour éviter que quelqu’un ne vienne échanger à propos des nouvelles de la terre. Il y avait déjà du monde, et Max essayait de trouver le visage de la pharmacologue. En vain. Par contre, il aperçut Ann, qui observait une partie de pokers entre plusieurs membres de l’expédition. Après avoir fait un crochet par le bar, ou il avait commandé un whiskey bien tassé, il s’était tout naturellement dirigé vers la biologiste pour prendre de ses nouvelles et discuter un peu. Ann et Max s’étaient rencontrés quelques années plus tôt, en Afrique du Sud. Max était en convalescence, et Ann était venue dans le cadre de son travail. Ils avaient vite sympathisés, et même plus que ça, avant de mettre fin à leur relation d’une manière brutale, sans que chacun ne se soucie de l’autre, ils s’étaient séparés. Et à leur grande surprise, ils s’étaient retrouvés en Guyane. Leur petit « passif » ne les dérangeait aucunement, et ils préféraient au contraire s’en amuser.

Alors qu’ils regardaient et encourageaient la partie de poker, que Max peinait à allumer une cigarette que les lumières s’éteignirent. Le « disjoncteur » avait sauté, et il n’y avait plus aucun courant dans toute la station apparemment. Des cris s’échappèrent de personnes apeurées, et un mouvement de foule débutait. Bousculé, Max laissa tomber son verre, et sa cigarette au passage. Réprimant un juron, la situation dégénérait un peu trop pour lui. Il fallait tenter de rétablir l’ordre avant que ce mouvement de foule ne se transforme en une panique générale et que des gens soient tués par l’effet de la masse. Dans l’obscurité régnante, Max grimpa tant bien que mal sur la table ou était groupé les joueurs de pokers quelques secondes auparavant. Ne sachant siffler, il gueula un bon coup afin d’attirer l’attention sur lui. Le sud-africain avait également sorti son briquet pour mieux se faire voir de tout le monde.

« Que tout le monde garde son calme s’il vous plaît ! Ce n’est qu’une panne électrique, le courant ne devrait pas tarder à revenir, alors gardez votre calme et ne paniquez pas ! »

Max attendit quelques instants que le message fasse son effet, avant de se rendre compte que la panne de courant durait trop longtemps pour être une panne classique.

« Y a-t-il des électriciens parmi vous ? Ou bien des ingénieurs ? Qu’ils se manifestent, s’il vous plaît. »

Elle avait été sur les lèvres de toute la base, la grande soirée de l’expédition arrivait enfin. Jóhanna l’avait attendu de pied ferme, notamment car elle était l’occasion de se laisser aller à sa passion….la musique. Elle n’avait même pas pensé à demander l’autorisation de jouer, cela semblait une évidence que son groupe joue à cette occasion. Bien sûr les détails administratifs comme s’arranger sur le côté « de garde » d’un de ses garçons ou encore l’installation du matériel dans la salle, arrivèrent bien assez tôt et en bonne « front girl » Jóhanna s’en occupa avec passion et mordant. Il semblait que dès qu’on parlait de musique, la petite blonde était possédée d’une nouvelle force de vivre, une véritable pile électrique qui avait un côté effrayant. C’est sans doute pour cela que pendant que la plupart des femmes de la base s’arrangeaient la figure pendant des heures devant leur glace, elle était en sueur en train de répéter pour une énième fois leur show. Après cela , elle fut bien obligée de passer par la case douche et préparation sous peine de paraitre complètement …enfin plus folle que d’habitude. Il ne fallait quand même pas effrayer la galerie avec une coupe de cheveux à en faire pâlir une sorcière. Sous le jet d’eau, elle repensa à sa chanson. Elle exprimait, à son avis, les sentiments de beaucoup de personnes de son entourage. Avec les nouvelles de la Terre, elle avait vu tellement de choses dans les yeux des personnes avec qui elle travaillait ou passer son temps libre. Certains étaient très heureux, ne pouvant s’empêcher de parler et parler de ce qu’ils avaient reçus comme nouvelles de leurs proches. Cela paraissait tellement surréaliste de penser que la Terre pouvait encore délivrer de bonnes nouvelles. Jò n’y croyait pas, à ce bonheur, elle arrivait plus à croire aux mauvaises nouvelles, bien plus nombreuses qui se peignaient sur bon nombre de visages. Alors qu’elle passait son peigne dans sa chevelure de blé, elle s’attarda un instant sur son reflet dans sa glace. Quelle expression devait-elle avoir ? Elle qui n’avait rien reçu devait être soulagée non ? Appartenir dans le groupe des contents…si seulement cela avait été aussi simple. Elle préférait simplement afficher cet air détaché qui n’en a rien à faire et se concentrer sur son concert.

Mais pas seulement, alors qu’elle passait son « outfit » pour la soirée, elle avait bien entendu aussi en tête un certain Max Willsdorff. Cette soirée était l’occasion de passer du temps ensemble et d’avoir un semblant de véritable rendez-vous galant sans pour autant le provoquer. En effet, ils ne s’étaient rien promis et n’avaient rien organisé, mais Jò était décidé à jouer la chanson qui les avaient fait se réunir la première fois. Un sourire se peignit en se remémorant cette première fois. Etrange sentiment qu’on éprouve en repensant à ce genre de première fois, des détails sordides vous sautent en tête sans même que vous les avez appelés. Revenant à la réalité, elle prit ses notes de musique et se dirigea à nouveau vers la salle qui contrairement à quelques heures auparavant était noire de monde. Elle se fraya un passage en lançant à la pelle des « pardon », « merci » , « excusez-moi » avant d’arriver à la scène et poser ses feuilles. Ils n’allaient pas jouer tout de suite. En effet Lorenzo avait tenu à régler certaines affaires avant de jouer. Cela ne gênait pas la chanteuse du soir. Au contraire, cela allait lui permettre de d’abord se saouler, et ensuite faire un numéro mémorable après. La pharmacologue tenta de trouver Max. Mais vu sa taille moyenne et la cohue, autant chercher une pièce de 20 centimes dans le lac. A défaut de trouver l’homme de ses pensées, elle trouva le bar et s’y adossa. Après une hésitation sur son choix de boisson, elle opta finalement pour du soft. Il ne fallait quand même pas perdre ses moyens tout de suite, surtout quand on savait combien miss Paulsen tenait l’alcool. En attendant que sa boisson soit préparée, Jòhanna se retourna pour balayer la salle et observer les gens danser sur la musique non live jouée pour l’occasion. Elle avait toujours aimé voir les différents styles. Il y avait ceux qui savaient danser, ceux qui ne faisaient que discuter et ceux qui tentaient en vain de suivre le rythme. Un détail frappa cependant Paulsen. Une jeune femme restant dans le coin à sa gauche, non loin d’elle et qui observait comme elle le reste de l’assistance avec un regard qu’elle connaissait bien : Mais qu’est-ce que je fous ici, j’ai besoin d’un verre. Ce qui motiva la blonde à demander un 2ème verre et à aller vers cette femme n’avait rien à voir avec de la pitié ou de la solidarité féminine, enfin presque pas, Jó était de nature à ne pas aimer voir les gens souffrir. C’était pour cela qu’elle travaillait sur sa cure miracle. Elle connaissait le visage, pour l’avoir plusieurs fois croisés, mais son nom lui échappait. C’était quelque chose avec un Ind - . Elle trouverait bien comment aborder la question, en attendant, elle se contenta d’agiter le verre devant le nez de son interlocutrice.

« Tiens bois ça, ça desserre le corset et permets de respirer et se détendre…Indira c’est ça ? »

Dans ce genre de soirée, elle laissait les « vous » au placard. Jò cacha un petit soupir de soulagement en apprenant qu’elle ne s’était pas trompée de nom. Cela évitait bien des embarras, même si elle était à présent vaccinée contre le ridicule. Ayant la parole facile, elle entama une discussion avec la jeune femme, tentant de faire plus ample connaissance et de parler des récents événements en omettant la Terre. Il ne fallait pas avoir 3 doctorats pour savoir que ce qui avait poussé cette femme dans son coin était bien évidemment lié à la Terre. Curieuse oui, mais pas interrogatrice, Jòhanna ne cherchait pas la source même du problème, c’était juste une petite discussion.

« Souris un peu voyons….écoute quand je vais chanter, je veux que tu te places devant moi et que tu danses comme si le diable t’avais pris au corps…parce que l’avantage d’avoir une foule compacte, c’est qu’on passe inaperçu …et si tu paniques….tu n’auras qu’à dire gou….. »

Ce qui fit s’interrompre Jòhanna ce ne fut ni un charmant jeune homme, ni une bousculade, ni une interpellation, mais une coupure de courant qui eut pour effet qu’elle resta sans voix, complètement interloquée et en stand by. Une coupure de courant était synonyme d’annulation de concert. L’on voyait là le sens de ses priorités.

« Ce n’est rien…certainement une petite farce ou un truc du genre oué… »Lança-t-elle nerveusement plus pour se convaincre elle, qu’Indira.

La pharmacienne regarda sa montre qui permettait une lecture nocturne, car avec la faible luminosité, l’on y voyait que très peu. Elle savait de part tous les exercices de sécurité que 21 secondes était le temps que mettait le courant à revenir. Comptant à voix basse, elle commença à déglutir. Un boucan d’enfer envahit la salle, comme un bourdonnement sonore. Collée contre le mur, Jò laissait passer ou éviter les bousculements des gens présents.
« Aie….mais faites attention à vous mettez les pieds ! » râla-t-elle contre un homme qui comme un taureau passait son chemin devant elle. C’est à ce moment là, elle entendit gueuler.

*Ca c’est Max* pensa-t-elle en inspirant longuement. Elle n’était malheureusement ni électricienne, ni ingénieure et donc d’aucune aide. Pire que tout, Jò détestait se sentir inutile. Tout en gardant une oreille tendue vers ce qui se dirait, elle reporta son attention sur Indira.

« Ca va ? »