Run, run, run ! | Max |

Opal jeta un coup d'oeil au cadran de son réveil, notant l'heure. L'après-midi était bien avancée déjà, mais elle supposait avoir le temps de se rendre à la salle d'entraînement pour faire un peu de sport. Depuis qu'elle était sur Pandora, elle avait passé limite plus de temps dans son corps de Na'vi que dans celui d'humaine, et elle n'était pas sans remarquer que la santé de ce dernier commençait à se détériorer. Elle s'était faite réprimandée par Saona, et avait finalement consenti à prendre une journée de repos, sans connexion avec son Avatar, et elle devait avouer que malgré la fatigue en moins, cela lui avait manqué. Elle savait qu'elle était censée passer son temps libre avec quelqu'un et que le programme déconseillait qu'elle reste seule, mais cela allait à l'encontre de sa nature et elle avait passé la plupart du temps dans sa cabine à lire, ou sur le pont à écouter de la musique, protégée du soleil par un coin d'ombre inopiné. Elle avait des milliers de choses à faire et la voilà qui s'ennuyait, elle à qui cela n'arrivait jamais. Elle venait de rentrer dans sa chambre après une promenade à l'extérieur, et poussa un long soupir. La meilleure solution était encore de faire un peu de sport pour entretenir son corps qui commençait à montrer des signes de faiblesse. Négliger son aspect d'humaine n'était pas très intelligent de sa part, aussi se morigéna-t-elle mentalement avant de se décider à se changer. Elle enfila un haut moulant et léger, ainsi qu'en pantalon sur le même modèle, une paire de chaussures de sport et enfonça dans un sac tout ce dont elle risquait d'avoir besoin au cours de la séance. Elle attacha ensuite ses cheveux en chignon, sans pouvoir empêcher des mèches trop courtes de venir retomber devant ses yeux, en plus de sa frange. Une fois prête, elle prit son sac et quitta sa chambre, se rendant à la salle d'entretien.

Une dizaine de minutes plus tard, elle pénétrait précautionneusement dans cette dernière, et constata avec soulagement qu'elle était vide. A cette heure de la journée, les autres étaient sans doute en mission ou occupés à des activités plus importantes, ce qui l'arrangeait beaucoup. Elle prit quand même la peine de se mettre dans un coin, , plus par réflexe qu'autre chose, n'aimant pas se retrouver en plein milieu d'une pièce. Elle laissa tomber son sac sur un banc, et commença par quelques étirements. Son corps craqua et se fit douloureux sur certains mouvements, preuve que sa condition physique était belle et bien entrain de se détériorer. Elle retint une grimace d'exaspération, et persista, jusqu'à être parfaitement échauffée. Elle grimpa ensuite sur le tapis roulant, appuya sur quelques touches et prit les deux écouteurs qui jaillirent de la console centrale. Il lui fallut quelques minutes avant de trouver un rythme convenable et une musique entraînante, avant de commencer à courir.

Pendant quinze minutes, elle en oublia le monde extérieur, concentrée sur sa musique et sa course régulière. Elle se sentait déjà faiblir, alors qu'une telle durée à cette vitesse n'aurait pas dû lui poser de problèmes. Elle persista cependant. Tout en continuant, elle prit une serviette qu'elle avait laissé sur la console et épongea son front et sa nuque luisant de sueur. C'est alors qu'elle leva les yeux, et aperçut un homme juste devant elle, à une proximité qui la fit sursauter de surprise. Elle était tellement fermée sur ce qu'elle faisait qu'elle ne l'avait pas du tout entendu arriver. Elle en perdit le rythme, et trébucha sur le tapis, qui lui continuait de tourner sans l'attendre. Elle partit en arrière, rompant son équilibre précaire, sans parvenir à se rattraper, et finit par chute brutalement sur le sol froid de la salle. Sans perdre ses réflexes, elle roula aussitôt pour se relever avec souplesse, n'ayant au moins pas perdu cela. Cependant, cette chute était ridicule, et elle se lamenta mentalement de s'être laissée surprendre avec autant de facilité. Elle leva les yeux vers l'homme, et rougit légèrement en souriant.

- Excusez-moi, j'étais ailleurs. Je ne vous ai pas vu arriver et vous m'avez surprise.

Elle se passa une main sur les reins qui l'avaient réceptionnée, retenant une légère grimace de douleur. Elle ne s'était pas vraiment faite mal, peut-être aurait-elle un bleu, tout au plus. Ecartant les mèches trempées de sueur qui tombaient sur son front, elle alla arrêter musique et machine, reprenant sa serviette. Elle était encore plutôt en forme, mais maintenant qu'elle avait perdu le rythme, autant arrêter et passer à autre chose.

A peine venait-il d’arriver sur Pandora que Max se retrouvait de permanence, pour une semaine. Au lieu de profiter des différentes sorties sur le terrain, des escortes de scientifiques ou d’avatars, lui restait le cul vissé sur une chaise, derrière un bureau, à noter les allées et venues des différentes sorties organisées par tout le monde. Tout le monde avait pu sortir un minimum. Tout le monde. Sauf lui. Et ça le foutait en rogne. D’autant plus qu’il se tapait pour second un incompétent fini qui n’arrêtait pas de le contredire et de remettre en question son autorité. Bref. La semaine avait mal commencé. Max profitait d’une ronde dans la coupole pour se détendre, découvrant à chaque passage un détail supplémentaire dans le paysage magnifique qui s’offrait à lui. Bien qu’il savait cette nature dangereuse, il n’attendait qu’une seule chose, pouvoir y faire un tour et se dérouiller les jambes un petit peu ….

Oh, bien sûr, Willsdorff savait qu’il aurait à accomplir ce genre de tâches administratives ici aussi, mais il ne pensait pas y être affecté dès son arrivée. La faute reposait uniquement sur le hasard, puisqu’il avait été tiré au sort. Il n’y avait peut-être qu’un seul avantage d’être de permanence. Celui d’être à peu près libre et de pouvoir faire ce que l’on voulait en dehors des rondes obligatoires, ou des notations de sortie, du moment que l’un des deux membres de l’équipe de permanence était à son poste. Comme à son habitude, Max irait se faire une petite séance de sport, vers la fin de la journée, sur les coups de cinq heures. Passant par ses quartiers, l’ancien militaire en profita pour passer une tenue plus appropriée, et regroupa le reste de ses effets dans un sac, avant de se diriger vers la salle de sport. Comme d’habitude, cette dernière était quasiment vide, la plupart des personnes étant en expédition, ou profitant de l’euphorie de l’arrivée sur Pandora. Ce qui n’était pas plus mal, au moins les différentes installations n’étaient pas bloquées pour rien.

Max s’appropria un banc, sur lequel il posa son sac, avant d’en sortir délicatement son contenu. Méticuleux, il enleva la veste de survêtement qu’il avait sur ses épaules, ne conservant qu’un t-shirt kaki marqué d’un insigne militaire quelconque. Par précaution, il posa une serviette sur sa nuque. Il se dirigea tout d’abord vers l’un des tapis de course. 30 minutes de footing pour s’échauffer, l’idéal. Plongé dans sa course, il ne faisait attention à personne, se concentrant sur le rythme de ses pas et sur sa respiration. Ses excès en tant que fumeur l’avaient privé de pas mal de ses qualités de sportif. Néanmoins, il ne s’en sortait pas trop mal. La salle était toujours désespérément vide, à croire que Max était le seul occupant de la Tortue. Son jogging terminé, Willsdorff décida de se faire une petite séance de frappe sur l’un des nombreux sacs que proposait la salle. Il ne connaissait rien de mieux pour se défouler, et pour oublier ses petits tracas quotidiens. De plus, c’était un excellent exercice physique. Ainsi, durant de longues minutes, Max frappa. Ce sac représentait désormais la cause de tous ses malheurs : le fait qu’il était bloqué ici, cet empaffé d’Ukrainien nommé Sergueï qui l’emmerdait depuis qu’il avait pris cette permanence ….

Une fois défoulé, Max transpirait désormais à pleine gouttes, il était temps pour lui de se rafraîchir quelques instants, et de faire une petite pause. Il constata qu’une femme était entrée, concentrée à courir. Lui-même était tellement concentré sur son sac qu’il ne l’avait même pas vue entrer. Son sac étant à côté des tapis de course, il se dirigea tout naturellement vers lui, afin de pouvoir en tirer la précieuse bouteille d’eau. Arrivé à la hauteur de la jeune femme, celle-ci sembla surprise de la présence du militaire, avant de perdre le rythme et de trébucher en arrière. Surpris, Max se porta immédiatement vers elle, essayant de l’aider à se relever. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque la jeune femme se confondit en excuses. Interloqués, sourcils braqués, il rétorqua du tac au tac :

« Et vous vous excusez en plus ?! »

Max lâcha un petit rire

« Ca va ? Rien de cassé ? »

Les deux mains accrochés à la serviette qui pendait des deux côtés de son cou, Willsdorff attendait une réponse de la jeune femme. Il semblait y avoir eu plus de peur que de mal mais sait-on jamais. En attendant, le sud-africain tâchait de se rappeler ou il l’avait déjà vu, mais il ne pouvait y arriver ….

Le nouveau venu était en sueur, signe qu'il était entrain de s'entrainer lui aussi. Sans doute était-il là avant, mais il était fort possible qu'elle ne l'ait tout simplement pas entendu venir. Elle détailla sa musculature travaillée, soulignée par son habit détrempé, avant de réaliser ce qu'elle faisait et de détourner les yeux avec embarras. Néanmoins, elle eut le temps de déduire qu'il ne s'agissait manifestement pas d'un scientifique ou d'un soigneur. Elle connaissait tous les membres de l'équipe des Avatars, aussi l'autre était-il très probablement un militaire, ce qui s'expliquait par son physique avantageux. Il s'était avancé pour l'aider à se relever, suspendant son mouvement en voyant qu'elle y arrivait toute seule, et paraissait dubitatif quand au fait qu'elle s'excuse. Il ne connaissait pas encore Opal, qui avait toujours l'impression de gêner, ne serait-ce qu'en respirant. Il ponctua sa phrase d'un petit rire, donnant l'impression qu'il se moquait de sa chute, chose qu'elle préféra ignorer. Comme il s'inquiétait de sa santé, elle lui adressa un sourire qui se voulait rassurant.

- Non, merci. Ne vous inquiétez pas, je me suis juste cognée.

En prononçant cette phrase, elle manqua presque de souffle, et réalisa qu'elle était encore sous le coup de son entrainement. Son rythme cardiaque, toujours trop élevé, rendait les violents battements de son coeur presque douloureux. Elle prit une petite minute pour retrouver une respiration normale, puis se rendit compte qu'elle mourrait de soif. Elle se dirigea donc vers son sac, en sortit une bouteille d'eau dont elle but avidement une bonne moitié. S'essuyant les lèvres, elle se tourna vers l'homme qui n'avait pas bougé, se demandant ce qu'elle devait faire à présent. Si cela ne tenait qu'à elle, elle l'aurait simplement planté là pour aller continuer son entraînement ailleurs. Non pas qu'il ait l'air antipathique, simplement elle se montrait naturellement méfiante et peu encline à aller vers les autres. Elle aurait préféré qu'ils en restent là. Cependant, elle connaissait les règles de la Tortue : maximiser les échanges entre les différents membres, éviter de rester seul, préférer les entraînements à plusieurs. Non pas que cela la réjouissait, mais elle était docile et n'aimait pas enfreindre les règles. Et surtout, elle voulait éviter d'attirer l'attention sur elle par une attitude trop solitaire. Elle résolut donc de se présenter, et se rapprocha de l'homme en tendant la main.

- Opal Hendrix, je suis pilote d'Avatar. Enchantée.

Si lui aussi s'était isolé pour venir s'entraîner au lieu de chercher quelqu'un de son groupe, elle supposa que cela devait être les mêmes raisons que les siennes. Elle espérait d'ailleurs qu'il refuse la proposition qu'elle allait lui faire, qu'elle se sentait bien obligée d'avancer. Ne le connaissant pas, elle ne voulait pas prendre le risque de le voir rapporter à Saona ou pire, à Eileen, qu'elle s'isolait et ne proposait pas d'entraînement collectif.

- Nous devons nous entraîner en groupe, aussi si vous n'avez pas terminé, je peux vous donner la réplique, dit-elle d'un ton neutre mais sans enthousiasme.

Elle essaya de se persuader que c'était aussi bien ainsi, se battre contre quelqu'un étant plus instructif que de le faire contre un sac de sable. Mais au moins, le sac de sable gardait-il le silence, avantage non négligeable.

Opal réalisa alors que sa carrure et le fait qu'elle soit pilote d'Avatar purent donner un côté étonnant à sa proposition. Elle sa hâta donc de préciser :

- Je suis pilote affectée à la protection, je sais me battre aussi et je dois garder ce corps-là en forme.

En général les autres ne comprenaient pas grand-chose aux subtilités de l'entretient des pilotes et de leur Avatar, et elle ne tenait pas à se lancer dans un cours explicatif. Elle se contenta d'essuyer la sueur sur sa nuque, attendant une réponse qu'elle espérait négative.

Il y eut apparemment plus de peur que de mal, et la jeune femme, hormis quelques bleus n’avait probablement rien cassé. Cela venait d’être confirmé par Opal. Max, rassuré, se contenta de passer un coup de serviette sur le visage et dans les cheveux, afin de sécher une partie de sa transpiration. Tout comme la jeune femme, il se dirigea en silence vers son sac, en extirpa une bouteille d’eau et entreprit de se rincer le gosier. Allez, encore une petite heure, et il retournerait à ses occupations, et Willsdorff retrouverait tout ses petits problèmes, et surtout le plus gros : Sergueï l’ukrainien. Une dernière gorgée et Max se préparer à aller vers un banc de musculation lorsque la jeune femme se présenta. Opal Hendrix, pilote d’Avatar. Il avait dû la croiser deux ou trois fois, mais ne la connaissait pas plus que ça. D’ailleurs, il ne connaissait même pas son nom. Et puis elle semblait s’être forcée pour se présenter, comme si elle allait à l’encontre de ses principes. Max serra la main tendue.

« Max Willsdorff. Mais on m’appelle Max. Ou Willsdorff. A vrai dire, c’est au choix … »

Maintenant que les présentations étaient faites, Opal lui proposa de lui donner la réplique. Willsdorff resta quelques instants interdit, un sourcil arqué, dévisageant son interlocutrice et sa carrure. Surtout sa carrure. Max n’était peut-être pas un pro du combat au corps à corps mais l’instruction que lui avait fourni les forces spéciales sud-africaines était plus que suffisantes. La jeune femme se hâta de préciser, devant l’hébétude de son interlocuteur, que c’était dans le cadre de son boulot. Willsdorff n’étant strictement pas au courant des affaires des pilotes d’Avatars, il ne savait absolument pas qu’il existait des catégories parmi eux. Et Opal semblait faire partie des protecteurs. Lui qui pensait qu’il était là pour ça, justement ….

« Bah écoutez euh .. bah oui, pas de problèmes ! »

lui avait-il lancé, encore sous le coup de la surprise.

Max but une autre gorgée d’eau avant de refermer une fois pour toutes le bouchon. Il lança la bouteille dans son sac d’un geste nonchalant avant de se retourner vers le ring, se dirigeant petit à petit vers lui. Tout en marchant, il questionna Opal.

« Vous avez déjà boxé ? Ou pratiqué des sports de combat, peut-être ? »

Juste histoire de rompre la glace et de savoir à quel niveau Opal se tenait. Il devra probablement retenir ses coups, mais qu’importe. Willsdorff récupéra les gants de combat qu’il avait laissé, avant de passer entre les cordes du ring et de monter sur ce dernier. Son adversaire ne payait pas de mine, mais il fallait toujours se méfier. Les apparences étaient la plupart du temps trompeuses. Max commença à s’échauffer légèrement, effectuant divers mouvements du cou ou des poignets, pendant que son interlocutrice faisait la même chose. C’était pas le moment de se casser quelque chose, surtout si le sud-africain comptait faire quelques sorties sur la planète. Willsdorff jaugea une dernière fois son interlocutrice.

« Prête ? »

Il la laisserait frapper la première, très probablement ….

L'homme se présenta non sans une certaine nuance d'humour, qui laissa Opal de marbre, toujours emmurée derrière son habituel sourire poli, qui plus que jamais semblait aussi figé qu'un masque. Il avait accepté, pour son plus grand malheur, non sans avoir l'air plus que dubitatif quand à ses capacités. Opal ne s'en formalisa pas, si l'habit ne faisait pas le moine, beaucoup de gens semblaient encore s'en tenir aux apparences. Elle aurait bien le temps de le détromper dans quelques minutes. Peu ravie de devoir passer du temps avec un presque inconnu, mais devant s'y plier par soucis de discipline, elle se motiva mentalement en se disant que cela ne pouvait être que bénéfique pour elle. Elle n'avait pas fait de combat amical depuis un moment, si on exceptait ceux avec Andrea où elle serait plus de punching-ball qu'autre chose. De plus, faire des nouvelles rencontres pouvait l'aider à se sortir de sa torpeur et de sa méfiance ; elle ne croyait pas un mot de ce qu'elle venait de penser, mais un peu d'optimisme ne faisait pas de mal pour une fois.

Opal reposa sa bouteille avec plus de douceur que Willsdorff, s'essuya une dernière fois le visage, enleva ses chaussures et le suivit jusqu'au ring installé pour les combats amicaux. Pendant les quelques pas qui les en séparaient, l'homme lui demanda quel était son niveau, avec l'air on ne peut plus dubitatif. Il s'attendait sans doute à donner des cours à une naïve pilote néophyte. Opal ne se formalisa pas de ce peu de confiance en ses capacités, n'étant pas du genre à se vexer facilement. Elle se contenta d'arborer toujours le même sourire sibyllin, avant d'énoncer d'une voix calme :

- J'ai été entraîné au niveau professionnel en combat rapproché. Mais ce n'est pas ma spécialité et je manque un peu de pratique depuis quelques temps.

Elle s'excusait ainsi à l'avance d'une certaine faiblesse dans ses performances. Avec son corps ramolli par ses trop nombreuses sorties en temps qu'Avatar, il ne fallait pas attendre des miracles. De plus, même si elle avait reçu une formation très poussée de par son ancien métier, sa prédilection restait les armes à feu. Elle devait néanmoins avoir un niveau acceptable pour ne pas rougir devant Willsdorff, du moins pouvoir lui tenir suffisamment tête pour que l'entraînement soit intéressant. Si possible, elle préféra ne pas en dire plus, n'aimant pas évoquer son passé. L'homme devrait s'en contenter.

Opal grimpa sur le ring à sa suite, et l'imita en commençant les quelques exercices d'échauffement. Elle avait déjà étiré ses muscles avant de courir, mais de façon non spécifique, et une deuxième couche plus axée sur ce qu'elle se préparait à faire n'était pas de trop. Elle grimaça légèrement en sentant la douleur diffuse dans le bas de son dos, qui craqua de façon sonore quand elle essaya de le solliciter. Mieux valait le laisser tranquille pour l'instant, au pire elle ferait une petite visite de contrôle pour être certaine. Non pas qu'elle soit excessivement prévenante sur sa santé, c'est tout simplement qu'elle n'avait pas le choix et que Saona serait furieuse si elle lui cachait une blessure même minime.

Une fois correctement échauffée, Opal récupéra une paire de gants qu'elle enfila rapidement, avant de se placer face à Willsdorff qui manifestement était entrain de l'attendre. Elle se mit en garde, motivée par la pensée puérile et égoïste de lui montrer ce qu'elle valait vraiment. Elle s'efforça de la chasser de son esprit. Il ne fallait pas laisser un simple entraînement déraper, et elle se moquait bien de ce qu'il pensait d'elle. Elle ne devait pas se laisser gouverner par de telles émotions.

Willsdorff lui demanda si elle était prête, question à laquelle elle répondit par l'affirmative, juste avant de plonger en avant. Elle n'avait pas attendu pour passer à l'offensive, prenant d'emblée l'initiative. Si elle n'était pas très forte physiquement, elle restait d'une rapidité non négligeable, et porta le premier coup sur la garde de l'homme avec une détermination inébranlable. Elle se calma un peu, se disant qu'il valait mieux y aller doucement au début, et se contenta d'enchaîner quelques coups précis et de bloquer ceux de son adversaire pour le moment. Elle ne voulait pas se laisser entraîner par l'ardeur du combat, se sachant prompte à y céder. Elle se contenta donc de rester dans un échange classique pour l'instant, montrant qu'elle maîtrisait amplement la technique, tout en restant attentive aux moindres mouvements de son adversaire.

[Désolé pour le retard]

La réponse d’Opal intrigua fortement l’ancien officier sud-africain. Entraînée au niveau professionnel au combat rapproché ? Ca voulait dire quoi ? La jeune femme n’avait pas l’air d’être une ancienne militaire, ou même un barbouze, et pourtant, si ce qu’elle disait était vrai, elle saurait probablement se débrouiller mieux que Willsdorff sur un ring. Max ne chercha pas à en savoir plus, de toute manière, il en saurait bien assez tôt lorsqu’il découvrirait la pilote d’Avatar sur le ring. Le Corps à Corps était loin d’être sa spécialité, et même s’il avait plusieurs rudiments de Krav Maga ou des différentes techniques d’intervention rapprochées, ce n’était pas ce qu’il maitrisait le plus dans sa carrière militaire. De toute manière, les fois ou il s’était retrouvé en close combat au cours de sa vie se comptaient sur les doigts d’une main. Cela dit, Max aimait toutefois frapper sur un sac, ou bien combattre amicalement sur un ring, histoire de maintenir son niveau.

Le Sud-Africain jaugea silencieusement son adversaire, l’observant enfiler ses gants méticuleusement. Max ne sous-estimait jamais son adversaire, c’était une leçon qu’il avait appris lorsqu’il jouait encore au Rugby, et qu’un gringalet l’avait retourné et envoyé à l’hôpital séance tenante. Il se pourrait bien qu’Opal soit capable de faire la même chose. Willsdorff tâcha de faire le vide dans sa tête, se concentrant pour le combat à venir. Il lui demanda si elle était prête, ce à quoi la jeune femme répondit par l’affirmative, se contentant de hocher la tête. Comme il l’avait prédit, ce fut elle qui porta le premier coup, prenant l’initiative en ce début de combat. Opal était rapide, et Willsdorff avait esquivé ce coup que par réflexe plus qu’autre chose. Le coup porté semblait détenir un message, comme si Opal voulait prouver au militaire de quoi elle était capable, comme si elle voulait lui prouver que comme tous les autres, il avait eu tort de la juger incapable de se battre.

Et elle était belle et bien en train de lui prouver le contraire. Ce n’était certainement pas Max qui menait la danse en ce début de combat. Ce qui n’était pas pour lui déplaire, bien au contraire. Il en profitait pour analyser les frappes de son adversaire, essayant de trouver la moindre petite faille dans sa défense. Le sud-africain se contentait de frapper dans la garde d’Opal, jaugeant ses réflexes et son attitude face à l’attaque. Elle connaissait son affaire, et Opal devait probablement mieux maîtriser les arts martiaux que le militaire. Mais il ferait avec. La ou la jeune femme l’emportait grâce à son agilité et sa rapidité, Max faisait le contrepoids avec sa force et sa robustesse.

Néanmoins, le militaire se décida de lancer l’assaut. Continuant à jauger son adversaire, Max « joua » avec Opal. Il essayait de la distraire, en multipliant les changements de direction, ceci afin de voir si elle le suivrait dans son petit jeu de jambes. Willsdorff jaugea également la défense d’Opal, enchaînant plusieurs coups à divers endroits de sa garde. La pilote d’Avatar était extrêmement rapide, et il serait dur de la surprendre. Voir même impossible. Max comptait donc sur sa puissance de frappe pour la faire faiblir et prendre le dessus, au moins moralement. Opal esquivait plusieurs de ses coups, mais elle en profitait également pour contre-attaquer. Plusieurs des coups de la jeune femme portèrent, la plupart étant parés par la défense du militaire. Cependant, un vint le frapper en pleine face, lui remettant les idées en places, Max remontant sa garde instinctivement. Il lui fallait reprendre l’avantage pour ne pas perdre la face, et Willsdorff reprit l’offensive, enchaînant plusieurs coups sur la garde de son adversaire avant de déceler une infime faille dans sa défense, qui lui laissait quelques secondes pour agir. Le Sud-Africain en profita immédiatement, et un direct du droit vint frapper le visage d’Opal, parvenant à contrecarrer son agilité.

« On continue ? »

Le combat ne semblait pas terminé et semblait même prendre un peu d’ardeur …

[HJ : et moi donc, désolée pour le délais u_u Petite panne d'inspi...]

Willsdorff se débrouillait au moins aussi bien qu'elle, mais Opal sentait que le combat rapproché n'était pas tellement sa spécialité, le cas échéant elle se serait rapidement retrouvé au tapis compte tenu de son manque d'entraînement et de sa faiblesse dans son corps d'humaine. Elle sentait même qu'elle pourrait avoir le dessus, si elle s'y mettait vraiment ; cependant, elle voulait éviter de se lancer à corps perdu dans la baston, sachant que c'était à peu près la seule façon de perdre son sang-froid et de se laisser aller à des pulsions qu'elle ne voulait pas laisser refaire surface. Combattre jusqu'à faire couler le sang était effrayant mais aussi étrangement jouissif, elle était bien placée pour le savoir, et voulait que ces sensations restent profondément enfouies. Quoiqu'il en soit, s'il était moins rapide et vif qu'elle, sa force physique nettement supérieure compensait largement et encourageait Opal à se concentrer au maximum, voulant éviter de prendre un coup qui risquait de faire mal vu la puissance du militaire.

Après un rapide échange de formalité, Willsdorff décida manifestement de passer à l'offensive de façon un peu plus prononcée. Il essayait de varier au maximum les coups, de changer sans cesse d'appuis et de direction, sans doute dans le but de déstabiliser Opal et la poussa à faire une erreur dont il pourrait profiter. Suffisamment vive pour suivre le rythme, la jeune femme tint bon ; néanmoins, cela l'empêchait de riposter avec suffisamment d'ardeur, trop occupée à parer les nombreux coups de son adversaire. Son visage, ordinairement calme et serein, était fermé et figé dans une concentration féroce qui ne lui ressemblait guère. Obnubilée par le combat, elle ne portait aucune attention à ce qui pouvait se passer et qui ne concernait pas l'échange de frappes qu'ils étaient entrain d'effectuer.

Après ses quelques tours de passe-passe, Willsdorff décida de profiter de sa force pour porter des puissants coups destinés à ébranler la garde d'Opal, but plus ou moins atteint. La pilote fléchissait devant ces frappes trop violentes pour sa carrure, et pestait intérieurement d'être si peu robuste. Elle sentait ses bras trembler alors qu'ils réceptionnaient les assauts de Willsdorff, et fut même obligée de faire un pas en arrière. Un instant, la pensée qu'il ferait moins le malin si elle se trouvait dans son corps d'Avatar lui traversa l'esprit, et elle rit intérieurement de sa sottise, se reconcentrant ensuite sur le combat. Puisqu'elle ne pouvait pas encaisser, elle préféra esquiver. En plus, cela lui permettrait de contre-attaquer plus facilement, et l'un des ses coups porta au visage du militaire, à sa grande surprise. Confuse, elle laissa tomber sa garde, le fixant d'un air inquiet.

- Je suis désolée, s'affola-t-elle, pensant qu'elle lui avait fait mal.

Cependant, il n'en était rien apparemment, puisque Willsdorff lui renvoya une puissante attaque sans se démonter. Opal, un peu désorientée par ce qui venait de se passer, para quelques coups en catastrophe, mais ne put empêcher le poing ganté de son adversaire de lui porter un violent coup au visage, plus douloureux pour l'amour-propre qu'autre chose cependant. Opal en resta interdite, et jeta un regard perdu au militaire qui avait l'air de bien s'amuser. Il lui lança un : « On continue ? » en témoignant, et la pilote se contenta de sourire, hochant la tête avant de repartir à l'assaut.

Motivée par son précédent coup dans la poire, elle commença à faire preuve d'une certaine agressivité, et lorsqu'une ouverture se fit dans la garde de Willsdorff, elle eut un malheureux réflexe et lui décrocha un coup de pied dans le ventre qui l'envoya contre les cordes du ring. Interdite, Opal le regarda basculer en arrière, ne comprenant pas tout de suite ce qui venait de se passer. Lorsque l'information parvint enfin à son cerveau horrifié, elle laissa tomber ses gants pour courir se mettre à son côté et l'aider à se relever.

- Je suis désolée, balbutiait-elle, rouge d'embarras. Vraiment désolée, je n'ai pas réfléchi à ce que je faisais, j'espère que je ne vous ai pas fait mal...

Elle s'en voulait terriblement, non seulement d'avoir frappé Willsdorff en traître, ce qui n'était pas très correct, en plus d'avoir manqué de le blessé, et surtout de s'être laissé bêtement allée à combattre sans réfléchir.

Après avoir reçu un coup de la part du pilote d’Avatar, Max semblait parvenir à reprendre petit à petit le dessus. Sa force physique lui permettait de contrecarrer les dessins de son adversaire en privilégiant ses efforts sur la puissance de ses frappes et sur sa résistance aux coups portés, tandis qu’Opal privilégiait la vivacité et la fougue. Lorsque son direct du droit fit mouche, le Sud-Africain ne put s’empêcher d’arborer un léger rictus au coin de ses lèvres, satisfait de la réussite de son attaque. Bien sûr, n’importe quel témoin qui arriverait à ce moment précis dans la salle d’entraînement pourrait dire que le combat était déséquilibré, et que porter de pareils coups sur Opal serait à l’encontre de tout bon sens. Pourtant, la jeune femme se révélait être un adversaire redoutable, confirmant que l’habit ne faisait pas le moine. Il était évident qu’elle avait reçu une formation sérieuse en matière de self-défense et d’arts martiaux. Cela ne l’étonnait en rien qu’elle ait été affectée à la protection du reste des Avatars. Max restait toutefois curieux et il se dit qu’il devait aller voir son dossier, afin de vérifier si la dame n’avait pas eu un quelconque passé militaire, qui pourrait alors devenir utile en cas de coup dur.

Distrait par toutes ces considérations et ces réflexions, Max ne portait plus la même concentration sur le combat. De plus, le coup porté auparavant au visage d’Opal lui avait donné une certaine confiance en ses capacités. La jeune femme, probablement motivée par le coup qu’elle venait de recevoir, redoublait d’ardeur au combat, enchaînant les coups, comme s’il était prête à tout pour rétablir les comptes. Le Sud-Africain ne vit pas arriver le coup de pied de la protectrice, qui l’envoya directement dans les cordes du ring, ne pouvant lutter contre un tel coup. Etonné, il avait été tout à fait surpris et il ne s’attendait pas à un coup de ce genre.

La respiration coupée, Willsdorff avait fléchi les genoux, et ses mains se reposaient dessus, le temps de retrouver son souffle. Le pied de la jeune femme avait frappé en plein dans son plexus. C’est comme si le temps s’était arrêté. Max peinait à respirer, cherchant désespérément de l’air à insuffler. Opal entre temps s’était précipitée vers l’officier, laissant ses gants derrière elle, ne cessant de s’excuser. Le coup avait été rude, et à l’attendre, elle ne l’avait probablement pas fait exprès. Ce devait sûrement être un réflexe de la jeune femme, qui devait être familière d’un art martial ou d’un style de combat ou l’on se servait de ses pieds et de ses jambes, comme le taekwondo ou le karaté. Chose que n’était pas le Sud-Africain, qui ne s’attendait pas une seconde à recevoir un coup pareil, et qui n’avait donc pas eu le temps de parer le coup convenablement. Max retrouvait finalement son souffle, respirant tout d’abord avec peine, avant de respirer normalement. Opal, elle, se confondait en excuses, ce qui n’eut pour effet que d’agacer et d’amuser le militaire.

Cessez donc de vous excuser, ce n’est pas grave, ça arrive. Je savais pertinemment ce que je risquais dans ce combat, et si je n’avais pas voulu recevoir de coups, je vous aurais proposé de faire un tennis, ou une partie de cartes à la place …

Cessant de s’appuyer sur ses genoux, Max se releva pour faire face à la jeune femme, un sourire amusé sur les lèvres.

Par contre, je serais reconnaissant si vous me laissiez boire un coup avant de reprendre ce combat, Miss Hendrix.

conclut-il avant d’ôter ses gants et d’entamer sa descente du ring.

Elle lui devait bien ça, après tout. S’aidant des cordes pour descendre, Willsdorff se dirigea ensuite vers son sac, dans l’espoir de se rafraîchir un peu, et de prendre quelques petites secondes pour se remettre. On lui avait toujours appris de se remettre en selle après une chute et ce n’était pas aujourd’hui qu’il allait déroger à la règle. Arrivant au pied de son sac, le Sud-Africain posa les gants sur le banc à côté, avant de se saisir de sa bouteille d’eau et d’en boire avidement le contenu. Rassasié, il se retourna vers Opal, se dirigeant à nouveau vers le après avoir rangé soigneusement sa bouteille.

Ou est-ce que vous avez appris un coup pareil ?

Willsdorff restait plié en deux, les mains sur les genoux à essayer de reprendre son souffle, ce qui ne fit qu'augmenter l'inquiétude d'Opal. Elle se pencha à côté de lui, l'observant sans savoir quoi faire, alors qu'il tentait de reprendre une respiration normale. Désemparée, la pilote ne pouvait que constater les dégâts qu'elle avait fait, alors que le militaire peinait à se calmer. Elle avait dû taper au mauvais endroit, toujours par réflexe et par habitude. Elle se morigéna silencieusement une fois de plus, ne pouvant croire qu'elle ait fait quelque chose d'aussi stupide. Elle resta là les bras ballants, incapable de mettre des mots sur sa confusion et sa honte.

Heureusement pour elle, Willsdorff n'avait pas l'air de lui en tenir rigueur, et dit presque négligemment entre deux inspirations forcées que c'était normal de recevoir des coups pendant un combat. Opal eut un sourire piteux.

- Cela ne me dispense pas d'éviter de vous coller un coup de pied en traître pendant un combat de boxe... Vraiment, je suis plus que navrée, surtout pour moi d'avoir été une telle idiote d'ailleurs.

Emportée par son élan, elle avait exprimé un peu trop de sa pensée, mais était trop préoccupée pour s'en apercevoir. Elle était soulagée que Willsdorff ne se soit pas énervé, la situation n'aurait pas manqué d'être embarrassante. Coup de chance pour elle, l'homme semblait d'un caractère agréable et ne se froisserait pas pour ce genre de choses. D'autant plus qu'elle connaissait beaucoup de mâles qui auraient très mal vécu d'être envoyé au tapis par une fille. Encore une fois, merci Eywa, Willsdorff ne semblait pas de ce type-là.

Il exprima son désir de boire. Opal hocha la tête et le suivit lorsqu'il descendit du ring. Il venait de lui rappeler qu'elle était également très soif, et qu'un peu d'eau serait plus que bienvenue. Ils se dirigèrent vers leurs affaires respectives pour s'hydrater. Apparemment, Willsdorff n'avait pas l'intention d'arrêter là l'entraînement. Tant mieux, dans un sens, s'arrêter là-dessus aurait sans doute laissé une mauvaise impression.

Après avoir bu, Opal retourna au ring tout en remettant de l'ordre dans sa coiffure qui lui retombait sur les yeux, rapidement rejointe par Willsdorff. Celui-ci lui demanda où elle avait appris à se battre comme ça, ce qui eut pour effet de la faire rougir en détournant la tête. Elle n'avait pas tellement parler de ça, mais après tout, il avait bien mérité une explication, et elle pouvait satisfaire sa curiosité. S'armant de courage, elle chercha la réponse la plus succincte possible, tout en espérant qu'il n'allait pas la relancer.

- J'ai reçu une formation au close-combat pour mon métier. Mon père était militaire, il m'a appris pas mal de choses. Il serait ravi de savoir que je tiens tête à un professionnel comme vous, termina-t-elle avec un petit rire.

Le colonel Hendrix avait toujours été en manque de disciple, et lorsqu'il avait réussi à faire accepter à sa fille l'idée de devenir garde du corps, il s'était montré particulièrement enthousiaste pour lui transmettre son savoir dans le domaine du combat. Opal s'était laissée faire, d'abord parce que cela faisait plaisir à son paternel, ensuite parce que ses enseignements se révélaient tous très utiles. D'une pierre deux coups.

Une fois remontée sur le ring, elle chercha ses gants du regard, espérant que Willsdorff ne la questionne pas plus avant.

Ramassant ses gants, Max se dirigea vers le ring, encore étonné du coup qu'il venait de recevoir. Il était loin de s'imaginer que la jeune femme connaisse de pareils coups. Arrivant sur le ring, Max fit jouer les articulations de son cou, afin de se remettre dans l'ambiance. Néanmoins, la réponse d'Opal le fit sourire.

Un professionnel ? Vous me flattez, Opal, mais je suis loin d'être un professionnel. A vrai dire, je suis loin d'être un adepte des sports de combat. Par contre, donnez moi un fusil d'assaut, et soyez certaines que je fais carton plein à 300 mètres, sans vouloir me vanter... Le seul sport de combat que j'ai dû pratiquer avec assiduité, c'était le rugby !

conclut-il de son accent sud-africain sur un petit rire.

Remettant ses gants, Max, interrogea du regard sa partenaire pour savoir s'ils pouvaient reprendre leur combat. Le militaire attendit patiemment que la jeune femme soit prête pour pouvoir reprendre leur lutte. L'officier commença à sautiller pour se remettre doucement dans le main, effectuant deux ou trois frappes pour jauger à nouveau la défense de son adversaire. Nul doute qu'il effectua également quelques parades pour éviter les coups portés par Opal. Il s'en méfiait de plus en plus désormais, et observait avec une attention particulière les moindres gestes de ses jambes, qui avaient une certaine tendance à se retrouver dans son thorax. Néanmoins, le sud-africain n'avait pas oublié le coup précédent, et il comptait bien remettre les compteurs à zéro .. en restant toutefois dans les bornes du combat.

Pourquoi ne pas avoir rejoint l'armée, comme votre père ? Enfin .. je suppose que vous en aviez les capacités non ? A l'accent, je dirais que vous êtes américaine ? Les différents corps d'armées américains sont assez ouverts quant au recrutement féminin, me semble-t-il ?

Max parlait tout en combattant. Son discours avait été tâché de nombreux soupirs, témoins des coups qu'il essayait de porter, mais également symbole de l'effort physique qu'il procurait. Les différentes interventions de la jeune femme avaient attisé la curiosité de l'officier sud-africain, autrefois responsable d'une équipe de reconnaissance et de renseignement. Autrement dit : le métier reprenait le dessus. Willsdorff désirait en savoir un peu plus sur cette jeune femme. Et puis cela permettait de détendre un peu l'ambiance du combat, plutôt que de chercher à se mettre des coups dans un silence pesant et agressif.

Le fait d'être un garde du corps féminin était quelque chose qui intéressait particulièrement le militaire. Il faut dire que dans sa tête, c'était un métier plutôt masculin, avec des malabars qui faisaient de la gonflette à longueur de journée et qui aimaient se pavaner en costume cravate, avec des lunettes de soleil et un écouteur qui pendait ostensiblement de l'oreille. Or la jeune femme semblait être plus discrète, plus intelligente .. ce qui faisait d'elle quelqu'un de plus redoutable. Au vu du passé de son père, qui était militaire, comme il l'avait appris un peu plus tôt, peut-être que tout venait simplement de là.

Ce fut lorsqu'Opal termina de répondre qu'il en profita pour porter un coup un peu plus puissant que la moyenne. Comme il avait pu le constater précédemment, la jeune femme encaissait bien, mais la saturation pouvait arriver vite, ce qui était normal lorsque l'on comparait son gabarit avec celui du sud-africain. Max continua son attaque, enchaînant les directs du droit et du gauche, pensant que la conversation l'avait peut-être déconcentrée.

En tout cas, cela ne l'empêcha pas de porter un violent uppercut envers la jeune femme, geste qu'il regretta aussitôt. Peut-être qu'il y était allé un peu fort cette fois-ci ...

Opal eut un petit rire suite à la réponse de Willsdorff. Après tout, elle était comme lui ; elle aussi était plus douée pour les armes à feu. Le corps à corps lui avait peu servi professionnellement parlant. C'était plus pour la discipline et la maîtrise de soi (bien que la jeune femme ne soit pas une excitée de nature, le combat réveillait toujours des pulsions malsaines, la preuve quelques minutes plus tôt) ainsi que pour se défouler ; et parce qu'elle était perfectionniste, elle souhaitait la qualification la plus complète possible.

- Vous êtes professionnel dans le sens où vous devez sortir du circuit militaire et parce que vous êtes dans la section protection de la mission, expliqua-t-elle pour préciser sa pensée. Moi, je ne suis que Avatar, cela ne fait pas parti de mon rôle premier.

Elle se rendit compte un peu tard qu'il était peut-être malaisé d'aiguiller la conversation sur le sujet de leurs rôles respectifs au sein de l'expédition ; elle avait encore du mal à le réaliser, mais certaines personnes jalousaient le statut des pilotes, les considérant comme des privilégiés. Opal regrettait beaucoup cet état d'esprit et avait déjà fait plusieurs bourdes sur le sujet, la plus douloureuse ayant été pendant sa dernière conversation avec Andrea, pensée qui la bouleversa. Elle se hâta d'enfiler ses gants et d'en venir aux mains pour clore le sujet, espérant que Willsdorff ne la relancerait pas.

Elle lui fit signe qu'elle était prête et tous deux reprirent leur entraînement. Histoire de se remettre dans le bain, ils n'échangèrent en premier que des coups simples facilement parés par l'adversaire. Opal remarqua que Willsdorff se montrait plus prudent et la testait de plus en plus, comportement logique après la tannée qu'elle lui avait mis sans le faire exprès. De son côté elle se concentrait surtout sur la parade et la défense, adoptant une posture peu agressive et essayant surtout de faire rempart à son adversaire. Elle s'était suffisamment emportée comme ça.

Tout en combattant, Willsdorff lui demanda comment elle en était venue à devenir garde du corps. Opal redoutait cette question tout en sachant qu'elle finirait bien par être posée. Tout en esquivant ou parant les coups qu'elle recevait, elle répondit de façon la plus succincte possible.

- C'est une longue histoire... J'ai voulu rendre service à une amie.

Elle se rendit compte trop tard que cela ne ferait qu'augmenter la curiosité de Willsdorff et se maudit de ne pas savoir mentir ou même contourner un sujet avec plus de facilité. Elle rougit mais heureusement cela pouvait être mis sur le compte de l'effort physique, tout comme la brièveté de sa réponse.

Willsdorff ne perdait pas le nord ; il profita du fait qu'elle soit entrain de parler pour briser sa concentration. Perdue dans ses pensées préoccupantes amenées naturellement par ce sujet, Opal ne réagit pas assez vite. Elle termina sa phrase tout en bloquant rapidement l'attaque, qui fut suivi par plusieurs autres qu'elle n'arriva à détourner que de justesse. Et quand le coup de poing arriva, elle ne parvint pas à l'esquiver totalement. Elle se pencha en arrière au maximum afin de diminuer l'impact, qui l'envoya quand même contre la barrière molle du ring. Elle glissa à terre et se remit debout presque aussitôt, constatant que ses réflexes étaient quand même nettement moindres que quand elle était dans son autre corps. Chancelante, elle s'appuya contre la barrière, reprenant haleine et vérifiant rapidement que Willsdorff avait bien fait une pause après son coup d'éclat.

- Un partout, grinça-t-elle avec un petit sourire.

Elle était un peu sonnée mais n'avait pas vraiment mal, la texture du gant et son recul en catastrophe ayant nettement atténué le coup, pourtant puissant, du jeune homme.

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